Recommencer à voyager, se retrouver, ressentir à nouveau le goût de faire du théâtre en pleine pandémie… se remettre en mouvement quand on est à l’arrêt parce que le monde s’est figé… partir à Wuppertal pour retrouver Cristiana dans ce voyage intime, écouter avec précision ses récits de vie pour les transformer dans une écriture scénique corporelle et verbale qui lui sont si particulières… ce spectacle a été tout ça pour moi, et plus encore. La suite logique d’une collaboration commencée il y a dix ans. Écouter, laisser émerger, et mettre en forme, de la confiance, de l’intuition, du doute, bref tout ce qui ne peut pas s’expliquer mais qui est à l’œuvre dans une création.
De et avec Cristiana Morganti
Mise en scène Cristiana Morganti e Gloria Paris
Scénographie et lumières Laurent P. Berger
Vidéo Connie Prantera
Assistante Elena Copelli
Création 29 Octobre 2022, Teatro la Cavallerizza, Reggio Emilia, Italie
Un défoulement, une confession, un monologue dansé, parlé et hurlé.
Une réflexion sur la crise existentielle et artistique d’une chorégraphe/danseuse pendant et après la pandémie. Entre désespoir et ironie, un conte tragicomique, poétique et autobiographique, la suite idéale de Jessica and Me, crée en 2014 et toujours en tournée.
Note d’intention
En 2020 et 2021 je traverses une longue phase sombre et difficile de ma vie. C’est arrivé à beaucoup, c’est arrivé à moi aussi. Au même moment que je perdais tous mes contrats de travail à cause de la pandémie, j’ai du affronter la terrible maladie et la mort de ma mère, le tout combiné avec une vive et galopante ménopause.
Alors que je plonge dans un état d’isolement et de semi léthargie, je perçois autour de moi, comme un étrange grondement, l’actionnisme dominant du monde de la danse qui explose dans les réseaux sociaux avec toute son énergie joyeuse et contagieuse. Soudainement je vois sur YouTube les collègues qui dansent dans leurs cuisines, leurs salles de bain, dans les rues, dans les bois, dans les parkings. On dirait qu’ils peuvent danser partout, et surtout qu’il suffit d’avoir deux mètres carrées pour continuer à s’entrainer. Mais comment font-ils? Pourquoi sont-ils si heureux?
Je tente de réagir et j’essaye de suivre les trainings on-line, avec des résultats tragicomiques. Un ami pour m’aider m’ouvre un compte Instagram et je découvre ainsi un monde parallèle, peuplé de gens jeunes, beaux, et souvent peu habillés et toujours de bonne humeur. Performer, artistes, personnages du monde de la mode, mais aussi simplement des personnes souriantes qui font du sport, beaucoup de sport, et qui donnent des conseils et des recettes de cuisine parmi les rires, les bisous et les petites étoiles. Et moi qui n’avais même pas une page web…
Je me sens complètement étrangère à cette réalité digitale des réseaux sociaux, j’ai l’impression d’appartenir à une de ces tribu qui n’acceptent pas de se laisser prendre en photo par peur de perdre l’âme.
« Tu dois absolument dépasser tes peurs » me dit un autre ami, « tu dois commencer à te filmer, parce ce qui compte c’est d’être présent! » “
Je dois me filmer? Mais comment je me filme? Je ne suis pas en forme, je suis trop grosse…
Je peux peut-être mettre un poncho? Dans la semi-obscurité? Semi cachée dans les buissons? Impossible.
On me conseille alors de faire des tutoriels, des vidéos dans lesquels je suis assise et j’explique des choses… « des chose »?
Mais moi je voudras revenir à l’époque où on entrait en salle de répétition et on travaillait en silence. Sans vidéo, sans photos, sans portables, parfois même sans miroirs.
On ne documentait rien. On avait juste confiance à l’instinct et à la mémoire. Tout était dans la force de ce que l’on vivait sur le moment.
Et c’était assez. Et c’était puissant.
Et c’était profond, parce que on avait le temps, on avait le TEMPS.
À la fin, poussée par mes amis digital-cool, j’arrive à dépasser mes réticences et je commence à faire des vidéos à contre-coeur.
Je me filme toute seule, pour moi-même, dans la salle de répétions.
Une sorte de journal intime triste et plein de rage.
J’accumule des mots et des mouvements, des petits bouts de papier et des vidéos flous.
Après quelques temps je revois les vidéos et je m’aperçois qu’ils sont accidentellement comiques. Je commence alors à me détacher de moi-même: j’aperçois des matériaux sur lesquels je peux travailler, et je comprends que seul un processus de création peut me sortir du trou dans lequel je suis tombée.
Je commence à imaginer un nouveau spectacle dans lequel, avec ironie et légèreté, je peux transformer tout « ça » en quelque chose d’autre.
Et me voilà.
Cristiana Morganti
14 Mars 2023
MA Scène National – Théâtre de Montbéliard (Montbéliard, France)
6-11 Mars 2023
Théâtre de la Ville (Paris, France)
Réserver
5 Décembre 2022
Festival Temporada Alta (Girona, Espagne)
8 Novembre 2022
Teatro Ponchielli (Cremona, Italie)
29-30 Octobre 2022 – Création
Teatro Cavallerizza (Reggio Emilia, Italie)